Le travail des étrangers en France

Droit des étrangers et de la nationalité

La situation des étrangers face à l’emploi en France présente des spécificités qu’il ne leur est pas toujours aisé de cerner.

L’autorisation de travail est elle obligatoire ?comment demander une autorisation de travail ?quels sont les métiers en tension ?comment effectuer un changement de statut ?, voila entre autres autant de questions que se posent au quotidien les étrangers en France. Maître Alain ENAM conseille et accompagne les ressortissants étrangers face à toutes ces problématiques.

Le régime général du travail des étrangers en France

Le travail des étrangers en France est organisé l’article L.313-10 du CESEDA, et par les articles 5221-1 et suivants du code du travail et L.8251-1 et suivants du code du travail.

Ce régime général s’applique aux travailleurs salariés de toutes les nationalités à l’exception :

  • des ressortissants d’un Etat membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen ainsi que de la Suisse.
    A ce jour, les ressortissants roumains et bulgares restent soumis au droit commun en étant tenus d’obtenir préalablement une autorisation de travail.
  • des ressortissants de Monaco et d’Andorre.

Les ressortissants algériens sont quant à eux soumis à un régime identique sur presque tous les points au régime de droit commun.

A) L’obligation d’obtenir une autorisation de travail

Un étranger ne peut en principe exercer en France une activité professionnelle qu’à la condition d’avoir obtenu une autorisation de travail.

L’employeur qui embauche un étranger sans autorisation de travail s’expose à des sanctions.

Les différentes autorisations de travail

1- Les titres de séjour valant autorisation de travail

* Deux catégories de titres de séjour valent par eux-mêmes autorisation d’exercer une activité professionnelle :

  • La carte de résident, dont les titulaires sont de plein droit admis à exercer l’activité professionnelle de leur choix sur l’ensemble du territoire français métropolitain, exceptés dans les départements et collectivités d’outre-mer ;
  • La carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale ». Toutefois, la carte délivrée aux conjoints d’un étranger ayant acquis dans un autre Etat membre le statut de résident de longue durée-CE ne leur donne pas le droit de travailler pendant l’année qui suit la première délivrance.

* La carte « compétences et talents », créée par la loi du 24 juillet 2006 permet à son titulaire d’exercer toute l’activité professionnelle en lien avec le projet qui lui permis d’accéder à ce statut.

Cette carte est valable trois ans, et elle est en principe renouvelable.

* La carte de séjour temporaire portant la mention « carte bleue européenne » est délivrée à des salariés titulaires d’un diplôme sanctionnant au moins trois années d’études ou justifiant d’une expérience professionnelle d’un niveau comparable.

Créée par la loi du 16 juin 2011 qui a transposé la directive européenne du 25 mai 2009 « relatives aux conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié », elle est délivrée au titulaire d’un contrat de travail d’une durée d’au moins un an pour un emploi dont la rémunération est au moins égale à une fois et demie le salaire moyen.

* Deux titres de séjour autorisent l’exercice d’une activité professionnelle salariée déterminée :

  • La carte de séjour portant la mention « scientifique-chercheur ». Elle dispense le chercheur étranger de demander une autorisation de travail ou de produire un contrat de travail visé par la DIRECCTE, mais ne lui permet pas d’exercer une autre activité que celle d’enseignant ou de chercheur pour laquelle il a obtenu son titre de séjour ;
  • La carte de séjour temporaire portant la mention « profession artistique et culturelle ». Elle concerne aussi bien les artistes titulaires d’un contrat de travail d’une durée supérieure à trois mois que ceux qui exercent leur prestation dans un cadre non salarié et qui sont liés par un contrat de plus de trois mois avec une entreprise à objet culturel. La carte, délivrée pour une durée correspondant à celle du contrat plus un mois, vaut autorisation de travail.

* La carte de séjour étudiant autorise son titulaire à exercer une activité professionnelle salariée accessoire. Depuis la loi du 24 juillet 2006, l’exercice d’une telle activité dans la limite de 60% de la durée de travail annuelle.

2- Les autorisations de travail apposées sur le titre de séjour

Les étrangers qui ne disposent pas d’un titre de séjour valant autorisation de travail, doivent demander une autorisation de travail qui si elle leur est accordée est apposée sous la forme d’une mention sur leur titre de séjour.

Ils doivent aussi se soumettre à une visite médicale, au plus tard trois mois après la délivrance de l’autorisation de travail, sous peine de se voir retirer cette autorisation de travail.

  • La carte porte la mention « salarié » si l’activité pour laquelle l’autorisation est demandée a une durée égale ou supérieure à douze mois. Les textes prévoient la possibilité de limiter la validité de l’autorisation de travail à une ou plusieurs activités professionnelles ou zones géographiques.
  • La carte porte la mention « travailleur temporaire » si l’activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois.
  • La carte porte la mention « travailleur saisonnier » si l’intéressé est titulaire d’un contrat de travail saisonnier au sens du code de travail, à savoir une activité subissant les fluctuations climatiques, principalement dans le secteur agricole.

La carte « travailleur saisonnier » est valable trois ans, mais elle n’autorise son titulaire à séjourner et à travailler en France que six mois sur douze consécutifs. La carte indique la ou les périodes durant lesquelles l’étranger peut séjourner en France. Celui-ci peut le cas échéant travailler pour plusieurs employeurs, et pas seulement celui qui, en établissement le premier contrat de travail l’a fait venir en France.

Le travailleur saisonnier doit s’engager à maintenir sa résidence habituelle hors de France. S’il reste en France en dehors des périodes où il est autorisé à travailler, il peut se voir retirer son titre de séjour sur le fondement de l’article L.311-8 CESEDA qui prévoit un tel retrait si les conditions de délivrance du titre ne sont plus remplies.

  • La carte porte la mention « salarié en mission » lorsque l’étranger est salarié détaché en France par son employeur étranger. Cette carte, valable trois ans et renouvelable, permet à son titulaire d’entrée en France à tout moment pour y travailler pour un établissement situé sur le territoire ou pour une société française sans que la situation de l’emploi lui soit opposable.

Il faut préciser que les étrangers entrés en France avec un visa de long séjour portant la mention « salarié », -ce qui suppose d’être en possession d’un contrat à durée indéterminée ou d’un contrat à durée déterminée d’une durée d’au moins- sont dispensés de demander une première carte de séjour. Ils peuvent travailler sous le couvert de leur visa long séjour.

3- L’autorisation provisoire de travail (APT)

Une autorisation provisoire de travail (APT) d’une durée maximum de 12 mois, peut être délivrée à l’étranger appelé à exercer chez un employeur déterminé une activité présentant par sa nature ou les circonstances de son exercice un caractère temporaire, ne relevant pas des autres autorisations de travail (art.R.5221-3, 13°). Les autorisations provisoires de travail mentionnent le nom de l’employeur. Elles sont par ailleurs renouvelables.

Les conditions dans lesquelles une autorisation provisoire de travail est délivrée sont contenues dans la circulaire DPM du 22 août 2007.

Les étudiants étrangers ne sont plus tenus de solliciter une autorisation provisoire de travail. La carte portant la mention « étudiant » donne droit à l’exercice d’activité professionnelle salariée dans la limite de 60% de la durée annuelle fixée à 1607 heures, soit 964 heures. (art.L.313-7 CESEDA et R.341-4-3 du code de travail)

4- Le récépissé autorise t-il l’étranger à travailler ?

L’étranger qui dépose une demande de première délivrance ou de renouvellement de titre de séjour se voit remettre un récépissé. Les droits conférés par ce récépissé diffèrent selon qu’il s’agit d’un récépissé de première demande ou d’un récépissé de demande de renouvellement d’un titre de séjour et selon la nature du titre dont la délivrance ou le renouvellement est demandé.

L’étranger titulaire d’un récépissé est autorisé à travailler dans les cas suivants :

  • lorsque l’étranger demande le renouvellement d’une carte de séjour permettant l’exercice d’une activité professionnelle salariée ;
  • lorsque l’étranger demande la première délivrance d’une carte de séjour sollicitée sur le fondement de l’article L.313-8 (carte portant la mention « scientifique-chercheur » ;
  • lorsque l’étranger sollicite la demande d’un titre de séjour sur le fondement des 1°, 2°, 4°, 5°, 6°,8°, 9°,10° de l’article L. 313-11 du CESEDA.

Il s’agit des étrangers prétendre à la délivrance de plein droit d’une carte « vie privée et familiale », à l’exception de ceux qui se prévalent de leurs attachent personnelles et familiales avec la France (7°), et des étrangers malades (11°).

  • lorsque l’étranger demande un premier titre de séjour « vie privée et familiale » au titre de la protection subsidiaire sur le fondement de l’article L.313-13 du CESEDA ;
  • lorsque l’étranger demande un premier titre de séjour « vie privée et familiale » sur le fondement de l’article L.316-1 du CESEDA qui vise les personnes qui portent plainte ou témoignent dans une procédure pénale contre les auteurs d’actes de proxénétisme ou de traite des êtres humains dont elles ont été victimes ;
  • lorsque l’étranger demande la délivrance d’un titre de séjour sur le fondement de l’art. L. 314-11ou de l’article L.314-12 du CESEDA (carte de résident délivrée de plein droit).

Enfin, le récépissé de demande de première délivrance d’un titre de séjour « profession artistique et culturelle » (art.L.313-9) ou autorisant l’exercice d’une activité professionnelle salariée autorise son titulaire à travailler une fois qu’il a obtenu l’autorisation de travail prévue à l’article L. 5221-5 du code du travail.

5- L’étendue géographique de l’autorisation de travail

L’autorisation provisoire de travail délivrée à un étranger en métropole n’est valable qu’en métropole, et jamais Outre-mer.

A l’inverse, une autorisation de travail délivrée dans un territoire ou département d’poutre mer n’est valable que dans le territoire où elle a été délivrée à l’étranger.

En conséquence, si l’étranger est titulaire d’un titre de séjour délivré Outre-mer qui lui donne le droit de séjourner en métropole et même si ce titre de séjour vaut normalement autorisation de travail (titre de séjour «vie privée et familiale »), il n’a pas le droit d’y travailler. Si l’étranger veut travailler en métropole, il doit solliciter une autorisation de travail que l’administration refuse la plupart du temps en opposant la situation de l’emploi.

6- Le contrôle et les sanctions de l’autorisation de travail

L’employeur qui embauche un étranger doit s’assurer que le titre de séjour produit par l’étranger est authentique (art.L. 5221-8 et R.5221-4 du code de travail).

Il lui appartient deux jours avant la date d’embauche d’adresses au préfet une lettre, datée, signée et recommandée avec avis de réception, ou un courrier électronique, comportant une copie du titre de séjour.

Le préfet doit de son coté, dans les deux jours à compter de la réception du courrier de l’employeur notifier sa réponse.

A défaut de réponse dans le délai, l’obligation est réputée satisfaite. L’employeur qui n’a pas accompli cette formalité pourra difficilement prétendre par la suite, en cas de poursuites pénales, qu’il ignorait que l’étranger n’avait pas de titre de séjour l’autorisant à travailler ou qu’il travaillait avec de faux papiers.

* Le fait d’employer un étranger dépourvu d’autorisation de travail est constitutif d’un délit qui engage la responsabilité de la personne physique ou morale qui a commis l’infraction.

La personne physique est passible d’une amende de 15 000 euros, et d’une peine d’emprisonnement de cinq ans, ainsi que de nombreuses peines complémentaires. Les peines sont portées 100 000 euros d’amende et à dix ans de prison lorsque l’infraction est commise en bande organisée.

Si l’employeur est lui-même étranger, il peut être condamné à une peine complémentaire d’interdiction du territoire français (ITF). Il peut aussi, indépendamment de toute poursuite pénale, se voir retirer son titre de séjour et notifier une obligation de quitter le territoire (OQTF), assortie le cas échéant de l’impossibilité d’exercer une activité professionnelle en France pendant trois ans.

* L’étranger est également passible de sanctions s’il travaille sans autorisation de travail.

Il peut ainsi se voir retirer son titre de séjour temporaire. La même sanction s’applique s’il n’a pas respecté les limitations géographiques et professionnelles figurant éventuellement sur sa carte ;

Il peut également faire l’objet de mesure de reconduite à la frontière s’il se trouve en France sous couvert d’un visa en cours de validité ou, s’il n’est pas soumis à l’obligation de visa, s’il travaille pendant les trois mois à compter de son entrée sur le territoire.

B) Comment demander une autorisation de travail ?

L’étranger qui vient en France pour travailler ou qui, titulaire d’une carte de séjour temporaire ne donnant pas le droit de travailler comme salarié (visiteur, commerçant, profession libérale…), souhaite changer de statut et travailler en qualité de salarié, doit obtenir préalablement une autorisation de travail.

Il existe deux procédures de demande d’autorisation de travail selon que l’étranger réside ou non déjà en France.

1- L’autorisation de travail demandée par l’étranger ne résidant pas en France

C’est la procédure dite d’introduction de travailleurs salariés qui s’appliquent ici.

Conduite par l’employeur, cette procédure était peu utilisée jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 24 juillet 2006. Elle concerne principalement les professions pour lesquelles il existe des difficultés de recrutement, des listes de ces métiers étant fixées par arrêtés.

Par une circulaire du 31 mai 2011, le ministre de l’Intérieur a toutefois donné aux préfectures de nouvelles instructions les incitant, au nom de la « maîtrise de l’immigration professionnelle », à réduire le nombre de titres de séjour « salarié » délivrées.

L’employeur doit déposer une demande d’autorisation de travail auprès de l’unité territorial de la DIRECCTE, soit du département dans lequel se trouve l’établissement dans lequel travaillera l’étranger, soit celui du département où ce dernier établira sa résidence.

Le dossier comprend les documents suivants :

  • le projet de contrat de travail ;
  • l’engagement de verser à l’OFII la redevance ;
  • un questionnaire de logement ;
  • un questionnaire comportant des renseignements sur l’étranger ;
  • une lettre indiquant les raisons pour lesquelles l’employeur souhaite faire venir un travailleur de l’étranger et donc la justification des recherches d’employés effectuées. Il s’agit généralement une attestation de dépôt d’offre à Pôle emploi).

Si la demande d’autorisation de travail est acceptée, l’OFII envoie le dossier au consulat aux fins d’obtention du visa.

Une fois arrivé en France, son visa long séjour dispense l’étranger de demander un titre de séjour, mais il est tenu de prendre contact avec l’OFII dans un délai de trois mois après son arrivée.

Si l’étranger souhaite s’établir durablement en France, il doit conclure un contrat d’accueil et d’intégration, impliquant qu’il suive au préalable une formation civique et linguistique s’il ne maîtrise pas le français.

La nature du titre de séjour délivré à l’étranger dépend de la nature du contrat de travail proposé.

2- L’autorisation de travail demandée par un étranger résident déjà en France.

Pour obtenir une autorisation de travail, l’étranger doit soit effectuer un changement de statut, soit être admis au séjour à titre exceptionnel, soit encore être admis à travailler au titre du regroupement familial.

* Comment faire un changement de statut ?

Lorsque l’étranger réside régulièrement en France sous le couvert d’un titre de séjour qui ne l’autorise pas à travailler et s’il a trouvé un employeur décidé à l’embaucher, il doit se rendre à la préfecture pour y retirer un dossier à faire remplir par cet employeur.

Le dossier comprend :

  • un contrat de travail à durée déterminée ou déterminée d’un an au moins, ou une promesse d’embauche ;
  • un engagement de l’employeur de verser une redevance à l’OFII
  • un questionnaire logement ;

Ce dossier, rempli par le futur employeur est ensuite déposé à la préfecture ou directement à l’unité territoriale compétente de la DIRECCTE dans le cas d’une autorisation provisoire de travail (APT)

Si la DIRECCTE compétente donne un avis favorable, après examen de la situation de l’emploi, l’OFII convoque l’intéressé pour une visite médicale, puis lui remet un exemplaire du contrat de travail visé par l’administration ainsi qu’une convocation pour aller retirer, soit à la préfecture une carte de séjour portant la nouvelle mention « salarié », soit à l’unité territoriale compétente de la DIRECCTE l’autorisation provisoire de travail (APT).

Ce qu’après avoir obtenu l’un de ces titres de séjour que l’étranger peut commence à travailler.

Dans la pratique, l’autorisation de travail est assez difficile à obtenir, l’administration opposant presque systématiquement la situation de l’emploi pour la refuser.

Il est très conseillé de bien réfléchir avant de solliciter un changement de statut qui en cas de refus, aboutirait à un refus de séjour.

Le changement de statut a plus de chance d’aboutir si l’emploi proposé figure sur l’arrêté ministériel répertoriant les métiers et les zones géographiques pour lesquels des difficultés de recrutement ont été constatées.

* L’admission exceptionnelle au séjour au titre du travail

Lorsque l’étranger réside irrégulièrement en France, il ne peut en principe obtenir une autorisation de travail que dans le cadre d’une régularisation de sa situation au regard du séjour.

L’article L.313-14du CESEDA issu de la réforme de novembre 2007 prévoit néanmoins l’admission exceptionnelle au séjour d’étrangers au titre du travail.

Initialement, il fallait qua la profession exercée figure sur la liste de métiers ouverts pour la région (métiers dits « tension », connaissant des difficultés de recrutement et pour la plupart plutôt qualifiés) aux ressortissants non communautaires, mais la référence à cette liste a été supprimée par la loi du 16 juin 2011.

L’étranger doit justifier d’une insertion en France (durée de l’emploi, durée de la présence en France…). La procédure reste en définitive entièrement soumise au pouvoir discrétionnaire des préfectures.

* Les étrangers entrés dans le cadre du regroupement familial

Les étrangers admis au séjour dans le cadre du regroupement familial bénéficient dès leur arrivée d’un titre de séjour leur ouvrant le droit d’exercer l’activité professionnelle de leur choix ou d’accéder à des stages de formation professionnelle rémunérés. Ils n’pont donc pas à solliciter d’autorisation de travail.

Ce titre est dans tous les cas depuis la loi du 26 novembre 2003, une carte « vie privée et familiale » pour les étrangers relevant du régime général, les ressortissants des pays relevant d’accords bilatéraux peuvent encore prétendre à une carte de résident (certificat de dix ans pour les algériens) si l’étranger qu’ils retrouver en est lui-même titulaire.

Dans l’attente de la délivrance du titre de séjour, les intéressés reçoivent un récépissé portant le cas échéant la mention « autorise son titulaire à travailler ».

Néanmoins :

  • Les membres de la famille d’un ressortissant marocain titulaire d’un titre de séjour temporaire doivent, sur le fondement de la convention franco-marocaine du 9 octobre 1987, demander une autorisation de travail sur présentation d’un contrat de travail. La situation de l’emploi ne leur est toutefois pas opposable.
  • le conjoint d’un étranger qui a acquis dans un autre Etat membre le statut de résident de longue durée-CE est mis en possession d’une carte « vie privée et familiale » qui, par dérogation à la règle générale, ne l’autorise pas à travailler pendant la première année. Il doit donc, s’il souhaite travailler solliciter une autorisation de travail.

C) La situation de l’emploi opposée à l’étranger

1- Le principe de l’opposabilité de la situation de l’emploi

Aux termes de l’article R.5221-20 du code du travail, l’autorisation de travailler en France peut être refusée en raison de « la situation de l’emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu, le cas échéant, des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et des recherches déjà effectuée par l’employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ».

En conséquence, l’administration peut refuser l’autorisation de travailler si elle estime que le niveau de chômage est trop important, et ceci, même si l’étranger présente un contrat de travail ou une promesse d’embauche établie par une entreprise qui souhaite le recruter.

Le refus de délivrer une autorisation de travail doit toutefois être motivé de façon précise et non par une allusion vague à l’importance du chômage en France ou dans la région.

L’administration doit fonder sa décision sur les états statistiques trimestriels des offres et des demandes d’emploi par catégories professionnelles correspondant à l’emploi particulier pour lequel l’autorisation de travail est sollicitée. La jurisprudence du Conseil d’Etat rappelle que l’administration doit procéder à un examen de la situation de l’emploi par rapport au métier et à la qualification précise de l’étranger, et non par simple référence à une branche d’activité.

La circulaire DPM du 22 août 2007 relative aux autorisations de travail exige des administrations qu’elles apprécient à la fois « in conreto et au vu d’éléments statistiques si le marché du travail est en mesure de répondre aux besoins de l’employeur ».

On peut ainsi penser qu’une décision de refus fondée uniquement sur des statistiques pourrait être censurée par le juge administratif ;

*Que faire en cas de refus d’autorisation de travail ?

En cas de refus d’autorisation de travail, l’étranger ou l’employeur peut adresser un recours gracieux au préfet ou au directeur de l’unité concernée de la DIRECCTE. Il leur également possible d’exercer un recours hiérarchique auprès du ministre de l’intérieur en évoquant par exemple l’erreur d’appréciation  (qualification spécifique, expérience de terrain, connaissance d’une langue…). Ils peuvent enfin exercer un recours contentieux ou saisir directement juge administratif.

Le refus de l’administration se limite au seul emploi sollicité et n’interdit pas définitivement à l’étranger tout travail salarié. Il est donc toujours possible pour l’étranger de présenter une nouvelle demande pour un emploi différent.

2- Les exceptions à la règle de l’opposabilité de l’emploi

Il existe en effets plusieurs exceptions au principe de l’opposabilité de la situation de l’emploi qui concernent des catégories bien déterminés d’étrangers ou certains types d’emplois. Il s’agit :

  • des étudiants de niveau qui souhaitent bénéficier en France d’une première expérience professionnelle en France (art.L.311-11 du CESEDA).
  • des activités où il y’pas des difficultés de recrutement
  • de l’autorisation de travail demandée en vue de la conclusion d’un contrat d’apprentissage ou d’un contrat de professionnalisation : la situation de l’emploi ne peut être opposée à la demande d’un étranger qui a été pris en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance mentionnées à l’article L. 221-1 du code de l’action sociale et des familles avant qu’il ait atteint l’âge de seize ans et qui l’est toujours au moment où il présente sa demande ;
  • des étrangers venant en France en vertu d’accords bilatéraux, en qualité de « jeunes professionnels » ou dans le cadre du programme vacances-travail ;
  • des salariés en mission.

3- La flexibilité de l’opposabilité du travail

L’administration examinera avec bienveillance les demandes d’autorisation de travail effectuées par :

  • es étudiants concluant un contrat d’apprentissage dès lors qu’il ne s’agit pas de les faire accéder au marché du travail mais de leur permettre de poursuivre une formation de l’enseignement supérieur ;
  • les artistes ;
  • les jeunes de moins de seize ans ;
  • les interprètes de conférence ;
  • les médecins ayant réussi les épreuves de la procédure d’autorisation d’exercice ;
  • les assistants de langue, lecteurs, professeurs de langue dans les établissements d’enseignement du second degré ou supérieur ;
  • les techniciens venant assurer le montage d’un matériel ou la mise en route de l’exploitation d’un brevet dès lors qu’ils sont employés par une entreprise étrangère qui a vendu à une entreprise française un matériel qu’elle fabrique directement ou cédé un brevet ;
  • les cadres supérieurs percevant des rémunérations élevées (salaire supérieur à 3 fois le SMIC) ;
  • les étrangers antérieurement dénommés « stagiaires professionnels » venant en France à des fins de perfectionnement professionnel.

Une liste des métiers en tension a été établie par arrêté du 18 janvier 2008. Cette liste concernait uniquement les ressortissants de nouveaux Etats de l’UE soumis à une période transitoire, mais c’est à partir de cette liste nationale qu’ont été sélectionnés les métiers ouverts par dérogation aux ressortissants d’Etats tiers.

Un arrêté du 11 août 2011 a refondu la liste concernant les ressortissants d’Etats tiers qui se limite désormais à quatorze professions, contre une trentaine en 2008.

D) L’étranger et le travail partiel et le travail intérimaire

1- Le travail à temps partiel de l’étranger

Il est possible de solliciter une autorisation de travail dans le but d’exercer un emploi à temps partiel.

L’article R.5221-20, 6° du code de travail précise que le salaire perçu doit être en tout état de cause équivalent au SMIC. Dans la pratique, cela revient à interdire dans la plupart des cas les emplois à temps partiel

2- L’étranger et le travail intérimaire

Depuis la loi du 20 novembre 2007, un contrat de travail conclu avec une agence d’intérim permet d’obtenir une autorisation de travail. Il permet également d’obtenir le renouvellement de l’autorisation de travail.

E) Le renouvellement du titre de séjour autorisant à travailler

En règle générale, le renouvellement de la carte de séjour autorisant à travailler n’est pas de plein droit, sauf pour les titulaires d’une carte de résident. L’étranger qui en souhaite le renouvellement doit remplir les mêmes conditions que celles qui ont justifié la délivrance du premier titre.

Les personnes qui ont été admises à séjourner pour occuper un emploi salarié doivent attester de la réalité de leur emploi. Le sort des titulaires d’un titre de séjour salarié est ici différent de celui des titulaires d’une carte de séjour « travailleur temporaire ».

1- Le renouvellement de la carte de séjour salarié

L’étranger doit déposer la demande de renouvellement d’autorisation de travail dans le courant des deux mois précédant son expiration avec les pièces suivantes :

  • une attestation de contrat de travail en cours ou promesse de contrat, ou autre document prouvant l’existence d’un travail ;
  • un timbre correspondant à la taxe perçue par l’OFII lors du renouvellement. Son montant s’élève aujourd’hui à 85 euros ;
  • un timbre « travailleur étranger » attestant de l’acquittement de la taxe due à l’OFII

* Le cas de l’étranger au chômage au moment où il demande le renouvellement de son titre de séjour est régi par l’article R.5221-33 du code du travail relatif aux modalités de renouvellement de l’autorisation de travail arrivée à expiration.

Lorsque le travailleur étranger est involontairement privé d’emploi au moment de l’arrivée à échéance de son titre de séjour, « salarié », il obtient automatiquement la délivrance d’une nouvelle carte temporaire portant la même mention.

Si à l’issue de cette première prolongation, il est toujours au chômage, une nouvelle prolongation lui est accordée s’il perçoit des allocations de chômage, pour la durée des allocations restant à courir.

S’il n’a pas ou plus droit aux allocations de chômage, la mention « salarié » peut être refusée ainsi que, par voie de conséquence, le renouvellement de sa carte de séjour, sauf s’il remplit les conditions lui permettant d’obtenir une carte de séjour à un autre titre.

2- Le renouvellement du titre de séjour « travailleur temporaire ».

* Si le contrat à durée déterminée est arrivé à expiration au moment du renouvellement (comme ça devrait plus souvent être le cas dans la mesure où la durée du titre de séjour est alignée sur celle du contrat), l’étranger dans l’état actuel du droit et sur le fondement de l’art. R. 5221-33 du code du travail, ne peut espérer obtenir le renouvellement de son titre de séjour « travailleur temporaire » que s’il a retrouvé un emploi, et de préférence dans un secteur caractérisé par des difficultés de recrutement.

* Lorsqu’une rupture du contrat est intervenue avant son terme et dans les trois mois précédant le renouvellement du titre de séjour, le droit au renouvellement est régi par le nouvel article L.313-10-1 du CESEDA qui concerne a priori de la même façon les cartes portant la mention « salarié » ou « travailleur temporaire ».

Ainsi :

  • s’il s’avère que la rupture du CDD, dans les trois mois précédant le renouvellement du titre de séjour est intervenue du fait de l’employeur : dans ce cas, l’intéressé devrait obtenir un nouveau titre portant la mention « travailleur temporaire », et ce titre si l’on s’en tient à la disposition précitée du CESEDA, devrait être valable un an ;
  • si la rupture a lieu avant ces trois mois, et même si elle n’est pas de son fait, l’étranger n’aura pas droit au renouvellement de son titre de séjour.